En 2007, Bordeaux est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO au titre d’ensemble urbain exceptionnel. Cette distinction concerne notamment l’architecture classique et néoclassique qui marque son histoire sur plus de deux siècles. Un bel ensemble que vous pourrez aisément admirer en vous promenant dans les ruelles de la ville. Si vous êtes néanmoins en quête d’idées nouvelles pour visiter Bordeaux, voici 5 lieux méconnus pour une (re)découverte hors des sentiers battus.
Sommaire :
- Boire un café dans un ancien marché bordelais du XIXème
- Visiter Bordeaux sur les traces de ses anciens remparts
- Découvrir les vestiges de l’ancien monastère des chartreux
- Traverser les deux passages bordelais
- Voir la plus vieille maison de Bordeaux médiéval
Boire un café dans un ancien marché bordelais du XIXème
Dans le quartier Saint-Michel (Tram C/D – Station Saint-Michel), non loin de l’actuel marché des Capucins, vous trouverez un bâtiment circulaire avec une architecture de type fer-verre du XIXe. Il s’agit de l’ancien marché des Douves qui accueillait, au début du siècle dernier, des marchands de volailles, de poissons et de gibiers. Aujourd’hui, il est exploité par “la Halle des Douves”, un collectif qui a transformé le lieu en maison des associations. Plusieurs événements s’y tiennent de manière ponctuelle, grâce à différentes salles mises à disposition. De manière permanente, vous y trouverez également un café associatif auquel vous pourrez accéder librement, du mercredi au vendredi, de 9h à 19h. N’hésitez pas à y faire un tour ! Rénové au début des années 2000, le bâtiment se présente comme un remarquable témoignage de la modernité de l’époque.
Visiter Bordeaux sur les traces de ses anciens remparts
La ville a connu successivement trois remparts sur une durée de plus de quinze siècles. Pour visiter Bordeaux de manière originale, vous pouvez vous mettre en quête des quelques traces de ces murailles encore visibles aujourd’hui. La claustration a commencé au IIIe siècle, à l’époque romaine, lorsqu’on ne parlait pas de Bordeaux mais de Burdigala. Ouverte au départ, elle érigea – pour se protéger de potentielles invasions barbares – de hauts murs larges de cinq mètres d’épaisseur. La cité s’étend alors sur 32 ha seulement et son tracé correspond à peu près aujourd’hui à un rectangle reliant le cours de l’intendance (au nord), la rue des remparts (à l’ouest) et le cours Alsace-et-Lorraine (au sud).
En témoignage de cette première édification, vous pouvez vous rendre à l’entrée de la rue de la Porte basse (Tram B – Hôtel de Ville). A l’angle de l’immeuble situé au n°1, une sculpture représente une porte de manière fantaisiste. Il s’agit probablement de Toscanan, une porte qui, encadrée de deux tours, se tenait alors non loin. Quant au nom “porte basse”, il fait référence à une brèche réalisée au moyen-âge dans le mur d’enceinte romain afin de faire le lien avec l’extérieur. En vous tenant au croisement de la rue, jetez un œil au-dessus du n°3 : est-ce que vous apercevez le bout de mur en brique qui s’élance ? Il pourrait bien s’agir d’un rare vestige de la première muraille de burdigala…
Au XIIIe, Bordeaux viendra greffer une seconde enceinte au sud de la première qui englobe ainsi le faubourg Saint-Eloi (coucou la grosse cloche). Vous pourrez voir les vestiges de cette dernière en vous rendant devant l’impasse de la fontaine Bouquière (Tram A/C/D – Porte de Bourgogne). Désormais fermée d’une grille, vous ne pourrez pas la voir dans son entièreté. Néanmoins, cela vous permettra d’envisager la manière dont le second rempart a été construit, à savoir une double muraille avec des douves. L’impasse, d’une centaine de mètres de long borde les restes du rempart désormais intégrés aux bâtiments voisins, construits au XVIIIe siècle. Quant au cours Victor Hugo par lequel on y accède, il représente l’axe des anciens fossés.
Les ruines les plus évidentes à trouver et à apercevoir sont celles du dernier rempart, construit au XIVe en lien avec l’essor démographique de Bordeaux. Cette nouvelle enceinte vient ainsi intégrer les quartiers Saint-Michel et Sainte-Croix (au sud), ainsi que celui des Grands-Hommes (au nord). Un fragment de ce mur est visible derrière l’église Sainte-Croix, au niveau de la rue Peyronnet (Tram C/D – Station Sainte-Croix).
Les murs qui ont longtemps enfermé la ville finirent par être tombés au XVIIIe, lorsqu’on décida, avec le travail des intendants du Roi, de moderniser et d’ouvrir le fameux port de la lune. Si vous souhaitez en savoir plus sur les modifications apportées lors de ce siècle, n’hésitez pas à suivre ma visite guidée “Destins de femmes : voyage conté dans le Bordeaux du XVIIIème”.
Découvrir les vestiges de l’ancien monastère des chartreux
Cap sur l’ouest ! A la découverte de la fascinante histoire du quartier Mériadeck, avant qu’il ne devienne le symbole de la modernité du XXème. Rendez-vous place du 11 novembre (Tram A – Station Saint-Bruno) pour visiter les vestiges des chartreux qui se trouvaient là au XVIIème siècle. Oubliez ce qui se trouve autour de vous et envisagez plutôt un terrain marécageux avec rien d’autre de bâti excepté un monastère. Détruit en partie à la Révolution, ce qu’il reste aujourd’hui de cet ancien édifice est l’église Saint-Bruno érigée en 1622, son presbytère rue Courpon, ainsi que les anciens jardins du couvent sur lesquels a été aménagé le cimetière de la chartreuse. Plusieurs personnalités y ont été inhumées dont le peintre Francisco Goya (déplacé à Madrid par la suite), l’écrivaine Flora Tristan ou encore l’archéologue Léo Drouyn.
Quant à l’église Saint-Bruno, restaurée en 1894, elle est considérée comme un des monuments les plus “authentiquement” baroques de Bordeaux. Vous pourrez admirer son élégante façade, mais aussi sa nef longue de 38 mètres voûtée en berceau. Un peintre italien, Jean-Antoine Berinzago a réalisé les fresques de cette voûte dans la seconde moitié du XVIIIe.
Traverser les deux passages bordelais
S’il est bien une chose qu’il faut connaître pour ne pas passer inaperçu, c’est le passage ou plutôt les passages cachés dans la ville de Bordeaux. Vous en trouverez deux, en plein centre-ville, qui ont en commun de dater du XIXème siècle. Bien que d’allure assez différente, ils valent l’un comme l’autre de faire quelques détours.
Le premier est un bien privé, partagé par plusieurs propriétaires – une copropriété qui explique la complexité du financement pour sa restauration car c’est celui des deux qui est le moins bien entretenu. On l’appelle la Galerie bordelaise et son histoire remonte aux années 1830. Ce passage traverse un îlot d’immeubles entre les rues des Piliers de Tutelle et Sainte-Catherine (n°12). Chaque entrée donne sur un vestibule, la galerie est recouverte d’une grande verrière et les magasins sont nichés dans 15 travées formées par des arcades. Au-dessus, un second niveau présente des fenêtres rectangulaires. Le décor est en stuc et on trouve de nombreux éléments de ferronneries rappelant l’architecture de cette époque.
Le second se trouve entre le cours de l’intendance (n°19) et la place du chapelet : il s’agit du passage Sarget. Également construit dans les années 1830, on y retrouve à nouveau une élégante verrière qui a pu bénéficier de travaux de restauration. Initialement privé, il porte le nom de son financeur, un armateur et négociant bordelais, Jean-Auguste Sarget. Vous pourrez également apercevoir une charpente métallique ornée de cornes d’abondance qui couvent de nombreuses boutiques aux airs luxueux.
Voir la plus vieille maison du Bordeaux médiéval
Pour terminer, direction la rue Neuve mais ne vous fiez pas à son nom ! Sa nouveauté ne date pas d’aujourd’hui et conserve les plus anciens témoins de l’habitat aristocratique de la ville. Au XIIIème siècle, l’emplacement de cette rue est stratégique : elle se situe près de l’ancien palais de Lombrière (actuelle place du Palais), à mi-chemin du pouvoir communal à l’ouest (Hôtel de Ville) et du pouvoir commercial à l’est (avec l’ancien port du Peugue). Elle débouche sur la chapelle Saint-Jean d’un côté (désormais disparue) et se termine sur les remparts du XIIIe, l’isolant ainsi au sud. L’endroit est parfait pour les grandes familles notables bordelaises qui souhaitent être au centre du pouvoir, tout en étant légèrement reculées et protégées par rapport au fleuve. La plupart de ces familles s’installent au cours du XIIIe et XIVe siècles.
Au fond à gauche de l’impasse qui se trouve dans la rue, vous trouverez les vestiges d’une résidence qui date probablement du XIVe. Elle se présente comme une des plus vieilles, voir la plus vieille maison encore debout à Bordeaux. Le rez-de-chaussée solidement appareillé ne présente qu’une seule baie en arc brisé. Au-dessus s’élevait l’étage d’habitation éclairé par deux baies jumelées. Il est difficile de savoir s’il y avait un étage de plus et de connaître le plan de cet hôtel qui devait être à l’origine beaucoup plus vaste. Les conflits rageant encore influencent néanmoins l’architecture de cette époque qui reste assez défensive : hauts murs crénelés, peu d’ouvertures sur la rue, etc. Les propriétaires de la rue auraient également disposé de jardins étendues entre la rue Neuve et la rue de la Rousselle. Ceux-là sont évoqués par le nom de la rue qui se situe juste derrière : Puits des cazeaux (caseau étant la forme gasconne du mot jardin).
Juste à côté, derrière la grille, se trouve par ailleurs un autre édifice très intéressant et qui date du XVIIème siècle. Il aurait appartenu à Jean de Carle, président du Parlement de Bordeaux puis plus tard, au XVIIIe, il fut occupé par Jeanne de Lartigue, épouse du célèbre penseur Montesquieu.
Voilà, vous disposez désormais de 5 nouvelles cordes à votre Arc pour visiter Bordeaux ! Quelques lieux originaux qui n’otent évidemment pas l’intérêt des monuments les plus célèbres de la ville, mais vous permettent de la découvrir autrement. Si vous êtes de nature à aimer les surprises, vous pouvez aussi décider de vous laisser guider lors de l’une de mes visites, toutes plus originales les unes que les autres !